
La crise du coronavirus a accéléré la digitalisation de l’économie. De nombreux emplois des services risquent de disparaître. Or, il s’agit de type d’emploi où les femmes sont très présentes. Il est primordial qu’elles puissent bénéficier d’une préservation de leur employabilité, qu’elles puissent saisir les opportunités offertes par le numérique et s’y former quels que soient leur niveau et leur secteur d’origine. Par ailleurs, le développement du télétravail risque d’être un facteur de retour à domicile des femmes non en raison de leur désir de télétravailler mais possiblement aussi en raison de problèmes de garde et de tâches domestiques.
Le secteur de la tech est particulièrement peu mixte en France, ce qui induit des effets d’éviction des femmes confrontées à des secteurs d’activité où elles sont en forte minorité. De ceci résulte l’expression de biais de genre dans les algorithmes et services numériques produits. Or, selon Isabelle Collet, maîtresse d’enseignement et de recherche en sciences de l’éducation à l’université de Genève, en l’espace de vingt ans, la place des femmes dans l’informatique a été réduite de moitié. Cette tendance est d’autant plus dommageable que de nombreuses femmes pionnières se sont illustrées par un rôle capital dans ce domaine.
L’orientation très genrée en France des métiers ainsi que la faiblesse des financements privés et publics en faveur des femmes fondatrices de start-up dans la tech auto-entretient ces constats.
Propositions
- Mettre un terme au blocage culturel en enrichissant les manuels scolaires, livres d’histoire et de sciences de références aux pionnières en ingénierie informatique (e.g. Hedy Lamarr, Margaret Hamilton, Grace Hopper) et insérer dans les programmes scolaires l’item « les femmes du numérique » ;
- Assurer la formation des femmes dans les secteurs du numérique et d’avenir à travers un devoir de formation à l’usage des outils numériques pour tout employeur ;
- Prévoir des formations gratuites au numérique de tout niveau dans les maisons de quartier à destination des femmes ;
- Introduire des cours ludiques obligatoires de codage et d’informatique dès la maternelle et tout au long de la scolarité à destination des enfants et adolescents ;
- Soumettre à l’éga-conditionnalité tout financement/soutien public dans la tech ;
- Instaurer des quotas mixité au sein des écoles d’ingénieur et d’informatique afin qu’ils aillent « chercher » les femmes;
- Mettre en place des diplômes passerelles sciences humaines/informatique afin de permettre des réorientations sans pré-requis durant les études ;
- Mettre en place des modules de formation en informatique et en gestion au sein des études littéraires, en sciences humaines et en Arts fortement féminisées ;
- Mettre en place des stages rémunérés pour étudiantes dans le développement informatique (dispositif de type « Outreachy » avec mentorat dans l’open source) ;
- Mettre en place un dispositif de bourses d’études ciblées visant à accroître le nombre de femmes dans le secteur informatique ;
- Proposer des formations numériques en interne à tous les employés (et non uniquement les managers ou les profils d’ingénieur) pour favoriser des reconversions dans les métiers de la Tech;
- Mettre en place une formation obligatoire sur les biais de genre pour tous les managers et recruteurs au sein des entreprises privées et publiques de la tech;
- Proposer des formations à distance sur l’usage des outils numériques, le droit du numérique ou le codage pendant les congés parentaux ;
- Créer des systèmes de géolocalisation de formations numériques afin de faciliter la reconversion aux métiers de la tech partout en France;
- Encourager les entreprises à envoyer les managers femmes de la tech s’exprimer dans les écoles et les forums et non uniquement les fondateurs hommes;
- Créer des espaces de co-working et des pépinières réservés aux femmes entrepreneures de la tech avec des haltes garderies intégrées. Prévoir aussi ces haltes garderies dans ces espaces lorsqu’ils sont mixtes ;
- Instaurer des quotas dans les équipes de codage avec des cellules féminines, en particulier au sein du secteur de l’intelligence artificielle ;
- Créer une autorité publique de lutte contre le sexisme et les discriminations dans le secteur du numérique au sein des algorithmes, de l’intelligence artificielle et des applications avec des pouvoirs de contrôle et de sanction.